INTERSIDERAL INTERRUPTUS

SIDÉRELLE, JEAN LOUIS VILIER
ÉDITIONS DU JAPYX, 1971

Le porno intersidéral, c'est sidérant. Mignonne, il n'y a pas à minauder : des extraterrestres, des fusées, des pistolasers et du cul, beaucoup de cul - sous toutes les coutures et en compagnie de toutes les formes de vies possibles - animales, gazeuses, mentales, à tentacules et attentatrices...
...à la pudeur !
Malheureusement, j'ai beau remuer le bocal dans lequel repose ma cervelle, du porno intersidéral, du porno science-fictif, je n'en trouve pas énormément d'exemples littéraires...
Il y a, bien entendu, les romans de Dominique Verseau (pseudonyme de Jimmy Guieu). Il y a aussi le génial Tout Feu Tout Femme signé Gilles Derais, troisième et dernier volume de la série des Benoit Lange, indispensable pour tout esprit malade... et... et...
...voyons voir...
...Rentre Tes Blancs Mutants, vingt-et-unième numéro d'OSSEX, écrit par Alain Lacombe et Serge Poulenc, dans lequel Eve Drum se tape quelques spécimens de nos friends from Frolix 8 (salut Phil K. !)...
...Science Et Vit de Philarète de Bois-Madame (pseudonyme de Jean Pierre Bouyxou), avec ses jumelles Barbarellesque azimutées et ses hordes de Schtroumpfs qui s'entreschtroumfduculent en schtroumflalaïsant...
...Les Potins de la Comète, toujours aux éditions de la Brigandine, un texte de Benjamin Rupert, pas encore lu mais dédié à Robert Sheckley et s'ouvrant sur "les espaces insondables des galaxies éternelles"...
...La Chair de L'Étoile, d'Alan Floor, collection Eroscope, chiant comme du Ursula K. Le Guin...
...et, j'y viens, j'y suis, ça y est :
Sidérelle, de Jean Louis Vilier, publié aux éditions du Japyx.
Un petit mot sur ces dernières : elles sont fameuses pour leurs couvertures au délicieux psychédégueulis typique des seventies, et furent fondées par Pierre Delalu, un homme de grande classe, proche d'André Guerber et de Roger Dermée.
Rien que de très normal.
Mais reprenons.
Sidérelle, c'est donc un roman de porno sidéral avec un peu de sidéral et beaucoup de porno. Ça pèse 250 pages en moyen format (du 13,5 par 21,5 centimètres, parfait pour se mesurer la zigounette) et c'est l'histoire d'une jeune fille un peu candide mais super jolie.
Pour citer l'atroce individu / fin connaisseur (rayer la mention inutile) qui, page 32, sodomise sauvagement notre tendre héroïne :
"Quelle harmonie de formes, quelle douceur de peau, quelle rondeur d'épaule, quelle cambrure de reins, quel volume de croupe !"
Une super jolie jeune fille, disais-je, que cette Sidérelle. Et qui vit sur une planète (surement la terre dans le futur des années 70) où l'amour est prohibé par les autorités mais néanmoins pratiqué en catimini, à l'hypocrite, par des rustres, des goujats, des lesbiennes et des minables.
Sidérelle, elle, est plutôt du genre sensuelle éclairée. Dans un monde parfait, elle aurait été abonnée à Plexus et aux intégrales de Regine Deforges. Pendant 50 pages, elle subit donc divers outrages sans piper (enfin, si, justement... en pipant... mais pas des mots) puis elle se décide à dire que c'est marre et se casse dans l'espace, à bord d'une fusée de location, direction la planète Orgasmus qui (d'après les boniments de l'office du tourisme) porte vach'ti bien son blaze.

"Ah !" que tu soupires en te frottant les paluches, "l'espace infini, ses monstres globuleux, ses pirates galactiques, ses planètes hostiles, ses astéroïdes fumants, ses spatioports mal-famés avec du Hawkwind à fond les ballons et..."
ET JE T'ARRÊTE TOUT DE SUITE, MON POTE !
REDESCENDS SUR TERRE !
Bicause, dans Sidérelle, tout ça, y'a pas. Le trajet en fusée dure 40 pages et l'auteur le passe uniquement à te scribouiller des descriptions puissamment tartignoles de collisions entre organes intimes, genitoires, trous, chibres et zobs à bulles dans la cabine occupée par Sidérelle.
Merci Jean Louis.
Puis Siderelle débarque sur Orgasmus, page 100, et paf, ça recommence, puissance dix mille et des poussières de barzums quantiques.
Trous et chibres coulissant, sperme jaillissant, zobinoux bondissants, foutre grandiloquent et simultanéité orgasmatique qui laisse tout le monde pantelant.

"Bourre, disait-elle d'une voix rauque, bourre, défonce-moi... aahh... j'ai mal et je jouis... je hais et j'adore... je crains et je désire... Viens en moi, ne m'épargne pas !"
Et en effet, en 150 pages d'une gigantesque partouze cent pour cent humanoïde-friendly sur Orgasmus la bien nommée, rien ne nous sera veritablement épargné.
Sauf la satisfaction de lire un bon porno intersidéral.
Car c'est bien simple, il n'y a rien de veritablement science-fictif dans Sidérelle. Juste quelques mots, de-ci de-là, pour faire semblant. Pas de monstre concupiscent à l'horizon, pas de pseudopodes caressants dans les parages, rien de fantaisiste, de fou, de dingue, d'hallucinant, de déroutant, bref, de sidérant.
Jean Louis Vilier aurait très bien pu te raconter l'histoire d'une jeune et jolie nénette qui prend le direct Paris / Béziers, se fait bourrer sur tout le trajet par divers passagers puis débarque en pleine féria du 15 aout, pile à l'heure de l'apéro gang bang du club de rugby local, que ça aurait été exactement la même chose.
T'esquisses les prémices de ce délice ? Non ? T'as de la chance. La déception fut grande, très grande - à la mesure de l'ennui ressenti.
Mais de cela, je commence à avoir l'habitude.
Reste que je n'en démordrais pas, et qu'un roman titré Sidérelle avec une planète baptisée Orgasmus et une couverture aussi joliment moche, ça aurait vraiment mérité un bien meilleur traitement que cette pauvre routine pornographique à la sauvette.
Bilan : encore un truc qu'il va falloir écrire soi même !

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